Jean-Baptiste et les jeunes qui font le djad.

Je publie ici l'homélie  du père Bernard Boissezon, qui sera toujours mon curé, puisqu'il a été celui de mes trois premières années de ministère.  il livre ici une réflexion très éclairante: le choix de Dieu n'est pas celui de la toute-puissance! Merci Bernard.

Homélie du 3ème dimanche de l'Avent; évangile de Jean 1/6-8;19-28

Des jeunes de notre pays, éduqués dans nos villes et villages, élèves de l'éducation nationale … partent « faire le Djihad » en Syrie ou ailleurs ! Ils sont issus, nous dit-on, de « familles normales » souvent athées (il est bien d'être athée pour être normal aujourd'hui) mais pas toujours. Ce fait est un vrai traumatisme pour la population française et plus largement européenne. Traumatisme bien plus grand pour les familles atteintes par ce phénomène.
Il nous faut évidemment éviter de grossir le fait qui ne concerne qu'un tout petit nombre. Il nous faut aussi nous rappeler que toutes les sociétés connaissent, à leur marge, des phénomènes d'extrémismes violents (rappelons-nous des brigades rouges, des mafias...). Personnellement je m'oppose à toute condamnation globale et sans appel de notre société. Ce type d'attitude effraie sans apporter la moindre solution.
Je veux regarder ce phénomène du départ au djihad de jeunes de chez nous comme un symptôme de maladies diffuses dans notre société. Heureusement ces maladies ne produisent des symptômes violent qu'exceptionnellement.

Je vais souligner deux maladies. Elles ne sont pas nouvelles ! Ce ne sont pas des virus que l'on vient de découvrir, ils existent depuis fort longtemps.

La première c'est le manque d'espérance (on dit aujourd'hui que l'on n'offre pas aux jeunes des « perspectives »). Nous avons du mal à nous tourner vers l'avenir et à croire que cet avenir peut être bon. Alors nous nous étourdissons dans la consommation, dans l'obsession pour le changement (le changement c'est tout le temps !), le renouvellement des objets, des activités...
C'est un leurre car notre avenir ne dépend pas de la qualité ni de la quantité de nos objets mais de la qualité de notre être, de nos relations. Les jeunes générations ressentent fortement ce manque d'espérance.
Comme chrétiens nous avons un témoignage à porter car nous croyons que Dieu sera présent dans notre avenir et dans l'avenir de nos sociétés. Nous croyons que le monde n'est pas abandonné à lui-même mais qu'il est accompagné. Ce témoignage est difficile à porter car nous sommes marqués, nous aussi, par la société où nous vivons.

La deuxième maladie c'est le mensonge … souvent le mensonge par omission, par dissimulation. « On ne nous dit pas tout » s'exclame une humoriste. Le mensonge c'est de ne pas parler de la mort. Le mensonge c'est de pas parler de certains souffrances que l'on fait subir aux enfants (par les séparations, les modes de garde, les rythmes de vie). On ne peut pas éviter toute souffrance mais on peut leur permettre de s'exprimer et les accompagner. Le mensonge c'est d'oublier de regarder en face la violence, celle de la société et celle qui est au coeur de chacun de nous.
J'entends dire dans les médias « Il est inadmissible qu'au XXIème siècle il se passe des choses comme ça ! » Mais qui a dit que le XXIè siècle était meilleur que les autres ? Il est dangereux de nous croire meilleurs car nous risquons de nous démobiliser de la lutte nécessaire contre le mal, le mal autour de nous et en nous.

Éduquer ce n'est pas cacher le mal mais apprendre à le discerner, à le combattre et aussi apprendre à le subir quand on ne peut l'éliminer. Éduquer c'est apprendre à gérer la violence, à la canaliser, à la maîtriser, à l'orienter comme énergie dans la bonne direction.
Comme chrétiens, là encore, nous avons un témoignage à porter car la Bible que nous lisons n'évacue pas la cruauté, la violence et la mort mais elle nous dit que le mal n'aura pas le dernier mot. Elle nous dit que le Christ est vainqueur du mal et de la mort et qu'il nous accompagne dans les difficultés présentes pour nous associer à sa victoire.

Pourquoi vous dire cela aujourd'hui ? C'est Jean-Baptiste qui m'a conduit sur ce chemin. Jean Baptiste nous montre le chemin. Il est un homme exemplaire pour trois raisons :

1/ Il ouvre une espérance. Il annonce la venue de celui qui est plus grand que lui, plus puissant que lui, celui que les humains attendent pour être réconciliés avec Dieu. Celui qui baptisera dans l'Esprit Saint. Jean annonce un avenir avec Dieu, grâce à celui que l'évangile appelle le Christ.

2/ Jean Baptiste est aussi l'homme à la parole forte qui dénonce le mal, le péché, qui n'a pas peur de parler aux gens simples comme aux puissants. C'est l'homme de la parole de vérité.

3/ Jean Baptise est aussi l'homme humble par excellence. Il ne se prend pas pour le Christ. Il accomplit la charge qui lui est confiée. Il dit « Je suis la voix » (qui crie dans le désert) il se considère seulement comme une voix, comme le porte parole de quelqu'un d'autre. Par son espérance, par sa parole de vérité (dénonçant le mensonge), par son humilité

Jean est le modèle du chrétien et de la communauté chrétienne dans le monde d'aujourd'hui.

Bernard Boissezon

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