Buisson ardent, chemin vers Pâques


    Prédication . Valpré le 28 février 2016
  1. L’Évangile du jour nous parle simplement avec des images que tout le monde comprend. Tout le monde comprend qu'il faut bécher autour d'un arbre pour aérer la terre afin qu'elle produise du fruit. Tout le monde comprend que les hommes qui meurent sous l’effondrement d'une tour que ce soit à Siloé il y a 2000 ans ou à Taïwan il y a 3 semaines n'y sont pour rien. Tout le monde comprend que ceux qui meurent sous le glaive des romains ou la poudre des bombes en Syrie sont des victimes non coupables.
  2. Jésus se sert de ces évidences pour nous parler d'une mort que nous pouvons éviter : la mort intérieure. Si nous ne nous convertissons pas, nous mourrons comme des imbéciles faussement heureux. Nous allons voir combien cet enseignement n'est pas une spiritualité qui nous retire du monde , qui nous ferait ne nous occuper que de notre nombril. Pas du tout. Cet enseignement sur l'intériorité est la clef qui ouvre la porte vers une vie plus vraie, plus réelle, plus complète pourrait-on dire. Pour Jésus, il nous faut porter du fruit. Il nous faut être fertile. Il nous faut entrer en terre promise ; là où coule le lait et le miel. Il nous faut suivre le chemin de Moïse. Écoutons Moïse !
  3. Que retenons-nous de la vie de Moïse. Toute mémoire est sélective évidemment ! 2 épisodes simplement. Le premier nous est donné par le texte de la première lecture : le buisson ardent, ou la rencontre de Moïse avec le Dieu de vie. 2 révélations sont données en ce lieu, quelque part dans le semi-désert, pas très loin du fameux Sinaï (même si toute localisation nous est en fait scientifiquement interdite!). Le buisson brûle sans se consumer ! Qu'est-ce donc ? Qu'est-ce donc sinon la vie en sa source. Toute vie brûle en se consumant. Seule la vie en sa source divine ne s'épuise pas, toujours jaillissante. Oui, Moïse ce jour-là a rendez-vous avec le Dieu de vie. On pourrait même aller jusqu'à dire qu'il est fait contemporain de Jésus. Jésus-Christ n'est-il pas lui-même cette vie éternelle qui se donne sans se consumer ? Plusieurs fois d'ailleurs Jésus fait référence à Moïse. Eh bien, leur première rencontre date de ce buisson ! Et c'est là que Dieu donne son nom, un nom nouveau, un nom jamais entendu en Israël, un nom que Moïse va être chargé de faire avaler aux Israélites. Je Suis Celui Qui Suis. Le Dieu Je Suis vient jusqu'à toi. Le Dieu de vie est l'être ; il EST. Mais son nom commence par un Je ; or sous le soleil, il n'existe pas de Je qui n'attende un Tu. Le Dieu de vie est un être qui cherche le dialogue, qui veut la relation. Ainsi porter du fruit signifiera pour nous d'aller trouver nos frères humains pour vivre ensemble. La conviction de cela ne naît pas dans une doctrine ou dans une morale ; elle naît dans la rencontre du feu intérieur. Que fais-tu du feu qui brûle en toi sans te consumer ? Ce feu est un chant intérieur qui t'appelle au fruit et au bonheur.
    [Refrain chanté : Grain de blé qui tombe en terre..]
  4. On a maintenant compris l'essentiel. Le reste de la vie de Moïse coule de source si j'ose dire ! Moïse signifie en effet « sorti des eaux », celles du Nil où il a été trouvé nourrisson dans une corbeille et celles de la Mer qu'il a traversée pour aller en Terre Promise. Je n'évoque que l'épisode d'après, pour ancrer le personnage dans notre mémoire d'aujourd'hui, en souhaitant que nous finissions notre temps de carême non pas en psychotant sur le bout de fromage de trop mais en cherchant dans nos vies l'exemple de Moïse. [Je vous invite à relire le livre de l'Exode.]
  5. Pour convaincre Pharaon de laisser partir le peuple, il faudra 10 plaies, la plénitude du mal, qui se concluent par la mort des premier-nés ; justement celle à laquelle Moïse avait échappé quand Pharaon faisait périr les enfants des Hébreux. Cela nous fait peur, nous horrifie. Comment lisons-nous alors la seconde lecture, la lettre de Paul aux Corinthiens ? Tout le peuple a été libéré ; tous ont reçu la grâce, tous ont vécu avec le Christ (préfiguré par la nuée) dit Paul et pourtant la plupart sont morts dans le désert. Car ils avaient refusé la présence de Dieu dans leur vie. Ils ne pensaient qu'à leur ventre ! La clôture sur soi, sur ses propres intérêts, finit toujours par être une clôture vis à vis de Dieu. Le Dieu de vie étant tenu à l'écart, la mort peut tranquillement s'emparer de nous. Spectacle de désolation pour un assomptionniste, qui veut que le Royaume du Dieu de vie s'étende en nous, entre nous et autour de nous.
  6. Cette dernière plaie, celle de la mort, est d'ailleurs tellement affreuse que le texte biblique hésite à l'attribuer à Dieu ; la cause est avant tout l'endurcissement du cœur de Pharaon. Un cœur de pierre. Chaque fois qu'une plaie survient, Pharaon cède en promettant la libération ; la plaie s'arrête. Puis, il ne tient pas sa promesse. Il prend la clémence, la patience de Dieu pour de la faiblesse, de l'inertie, de l'indifférence. C'est le fameux figuier qui ne se fatigue pas de porter du fruit car rien ne change qu'il en porte ou qu'il n'en porte pas. Jésus nous prévient, comme la 10ème plaie : ne gaspiller pas votre vie à attendre. L'expérience intérieure est celle d'un feu et non d'une mare aux canards !
  7. Car oui, il y a le feu. Le feu en nous, ai-je dit. Le feu aussi parmi les hommes, mais un feu mordant, un feu qui les dévore. Revenons à Moïse. Moïse va aller trouver son peuple, pour lui dire que le Dieu d'Abraham, le Dieu de leur père, c'est le Dieu de vie, c'est le Dieu Je Suis. Et il ne sera pas écouté. Savez-vous pourquoi ? Parce que nous dit la bible (Ex 6,9) : « Moïse parla aux Israélites mais ils n'écoutèrent pas Moïse car ils étaient à bout de souffle à cause de la dure servitude ». La servitude de la misère, de l'exil, du chômage, de la désespérance, voilà ce qui bouche les oreilles. Restaurer un Oui intérieur à Dieu en chacun des cœurs des hommes, c'est identiquement restaurer la justice, le minimum pour vivre, le simple repas de famille. Avons-nous vu une seule fois Jésus laisser ses disciples ou les foules avoir faim ? Alors, oui, prends ton bâton Moïse, délivre nous de nos esclavages et conduis-nous vers le Dieu brûlant de vie.
    Prions ensemble. Seigneur, sois en nous le feu éternel, sois en nous l'appel permanent à la vie, à l'écoute des misères, à la mémoires de tes œuvres.
    Loué sois-tu Seigneur de tracer en nous en lettres de feu notre chemin vers Pâques.

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